WeiD était invité ce mardi 6 décembre 2022 par X-PM pour assister à l’intervention d’Éric Labaye, directeur de « l’X ». Cette rencontre a été l’occasion d’évoquer des sujets de préoccupation qui sont au fondement même de la création de WeiD.
Tôt dans sa présentation, Éric Labaye a évoqué une « crise des talents ». Ces termes, choisis par le directeur d’une des plus prestigieuses institutions d’éducation française sonnent comme une mise en garde. Cette crise n’est pas seulement une crise du nombre. C’est évidemment aussi une crise des compétences, une crise du savoir dont sont pourvus les étudiants, ingénieurs ou non, relatifs aux enjeux de société d’aujourd’hui et de demain.
C’est ainsi qu’en termes d’environnement par exemple, l’X doit former pendant une semaine les nouveaux étudiants aux facts, autrement dit à la réalité – tout du moins l’exactitude – des données disponibles en matière de climat, d’émissions de CO2… On ne bâtit pas une recherche nationale, une capacité à innover, à développer des moyens de Carbon Capture, de nouveaux matériaux, identifier de nouvelles opportunités énergétiques… sans des idées claires quant aux enjeux économiques et sociaux.
C’est notamment ce qui peut permettre de répondre de manière éclairée à une question portant sur l’alternative sobriété/technologie face à une crise énergétique. L’une n’empêche pas l’autre. On peut être sobre et innovant. Raisonnable et raisonneur. Pour cela, l’éducation a un grand rôle à jouer.
Si elle s’en donne les moyens et obéit à sa fonction sociétale de long terme, la classe préparatoire peut en particulier être un véritable accélérateur de particules physiques – il faut tenir un rythme soutenu – et intellectuelles.
À condition d’abord de ne pas délaisser les Mathématiques qu’on peut, comme les règles de grammaire, ne pas utiliser quotidiennement consciemment et pourtant s’en servir, qui procurent rigueur, méthode et capacité d’abstraction. À condition ensuite dans les Humanités de ne pas former à répéter par cœur ce dont des « talents » ne maîtriseraient pas le sens ou à simplement reproduire des dissertations sans en comprendre la dialectique, incapables de faire face aux enjeux de société de demain. Rien de tel que de céder aux sirènes du bachotage et des « astuces pour réussir » pour concourir à la « crise des talents ». À condition enfin, comme Éric Labaye l’a affirmé haut et fort de comprendre qu’ingénierie, économie et sciences humaines – la transdisciplinarité – doivent être associées pour faire émerger les innovations qui donneront à une école comme l’X créée en 1784, un rayonnement international comparable à celle du MIT – et ses 4 milliards de budget – ou Oxford – avec ses 9 siècles d’existence, à la France un surcroît d’attractivité et de compétitivité dont elle a besoin.
Gabriel Koutchinsky, jeune étudiant – double diplôme HEC-Ensae – en data science venu visiter nos préparationnaires chez WeiD, leur expliquait opportunément qu’un data scientist ne saurait être excellent sans des connaissances en économie du comportement, en sociologie, en histoire des innovations…
Un interlocuteur du monde éducatif, perplexe quant à l’intérêt de la classe préparatoire, plaidait récemment devant moi – de manière étonnamment péremptoire – pour une « pensée concrète »… Savait-il au moins ce qu’est un oxymore ?
Dans La République, Platon relie Raison et la subtilité d’esprit… : à des compétences très spécifiques, des savoirs concrets, un regard transdisciplinaire apporte subtilité, profondeur, recul. Il peut aussi pallier une crise des talents. Et procurer des talents à ceux à qui il revient de gérer des crises.